Dans la difficulté permanente de se dire que je ne suis pas
au bon endroit au bon moment, j’arrive quand même à comprendre pourquoi je suis
en pleine dépression, il est si facile de se tromper de chemin, tout le temps,
pas forcément en faisant exprès, juste par négligence, par crédulité ou en
faisant confiance à de bonnes têtes d’humain. Les anciens parlent de mauvaises
étoiles mais à chaque fois que je lève les yeux au ciel l’ensemble est gris,
pas d’étoiles. C’est peut-être moi qui ne va pas, je marche dans le mauvais
rythme et aussi loin que je puisse puiser dans ma mémoire ou en regardant les
photos tout apparait logique. En 1969 le 25 février je suis mort-né, je ne dois
la vie qu’à une énorme claque dans la gueule, mauvais timing entre la sortie du
ventre de ma mère et la première respiration. Depuis ce jour je suis mort déjà
trois fois, j’ai vraiment dû faire quelque chose d’horrible pour y échapper à
chaque fois. Je suis appelé à faire mon service militaire et je monte dans un
train mais le train que j’ai pris n’était pas le bon, je devais atterrir à St
Dizier je suis arrivé à Nice. Toute ma vie je me trompe de route, pourquoi,
comment, je n’en sais rien. Je suis conscient de toutes mes erreurs mais il y a
quelque chose qui ne va pas avec moi, je ne suis pas moi, je suis dissociable,
la tête/esprit puis le corps. L’un ne fonctionne pas avec l’autre. Alors depuis
l’adolescence je frappe contre les murs à poings fermés, juste pour voir qui va
lâcher le premier, l’esprit ou le corps. Là encore je n’ai jamais eu de limites
jusqu’à tomber malade et finir au bord de la falaise, à choisir entre la suite
ou la fin. Encore une fois de plus j’ai pris le mauvais chemin. Un jour j’ai
fermé les yeux au moment de traverser une voie ferrée, le train était en
retard, problème de timing, ça fait 48
ans qu’il y a chez moi un problème de timing. Alors j’ai pris des drogues, pour
ralentir le rythme et d’autres pour accélérer, j’ai foncé contre un arbre sauf
que la veille ils l’avaient coupé. Mauvais timing. Je ne cherche pas à mourir,
oh non, c’est une perte de temps, je suis capable de sauter dans le vide et de
me ramasser la gueule sur le trottoir car j’ai sauté trop tôt. Mais c’est pour
cela qu’il est cool mon suicide, c’est que je peux l’écrire encore et encore,
je suis né pour cette expérience, dès le 25 février 1969 je suis ici pour
tester les distances entre le temps qui file sur une horloge, ton horloge, et
le temps qui file sur mon horloge et franchement il n’y a rien à y faire, nous
sommes en décalage, je suis en décalage avec ce monde, avec toi mais en
permanence. Mon doc qui est le doc le plus cool de tous les docs a compris que
même un psy perdrait son temps, et mon doc m’a demandé de dormir, dormir jusqu’à
ce que mon temps rattrape le temps des autres et que seulement une fois que les
phases s’accordent je pourrais revenir à la réalité et me réveiller. Le
problème c’est que même les yeux fermés j’arrive à vous voir, j’arrive à partir
en avance et arriver en dernier, simplement parce que je me perds en chemin,
parce que je m’attarde à parler aux oiseaux, aux chevaux, aux animaux, à des
humains aussi, ceux qui veulent entendre mon histoire, ma vie se résume à une
bouteille vide jetée à la mer, c’est moi qui l’ai vidée, j’ai tout bu, et comme
un con j’ai jeté cette bouteille à la mer en oubliant d’y mettre mon message, j’étais
encore une fois de plus en avance car j’avais le bout de papier dans la main
avec le message du S.O.S……mais il est trop tard maintenant.
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