vendredi 16 août 2019

LOS ANGELES, MICHEL DRUCKER EST COMPLÉTEMENT BOURRE


Tu te souviens ces étés avec des ciels nuageux, de ces pluies, et de temps en temps un ciel bleu azur, comme sur les photos de vacances dans le sud, comme un reset sur la pluie et juste après un énorme orage. Le bleu annonçait toujours un orage, tu avais 9 ans. Maintenant la pluie joue le reset sur le soleil, sur le bleu, tu ne fais plus de pronostique sur le lendemain, la pluie n’annonce pas un orage, juste une catastrophe, tu as cinquante ans. Tu ramassais des cailloux dans une nouvelle pelouse, tes parents avaient décidé d’abandonner la ville, la cité du Haut Du Lièvre, là où tu t’amusais comme un fou parmi quelques fous, des clodos, des urbains quoi. A 9 ans tu ramassais des cailloux tout l’été, les vacances c’étaient terminé, tu étais à la campagne, comme une récompense soi-disant. Tu te rappelles t’être fait chier comme un rat dans une fourmilière, rien à faire, juste ramasser des cailloux dans ce nouveau gazon. Tu priais pour qu’il ne pleuve pas, parce qu’il pleuvait tout l’été, chaque été, de la pluie et juste quelque brin de soleil furtif. Tu avais 10 ans et toujours autant de cailloux. Ta mobylette t’emmenait même en hiver jusqu’aux étangs, même sous la neige tu ridais sur le verglas, en hiver il y avait de la neige, trop de neige, mais jamais assez pour empêcher ton père de t’emmener au collège. Tu avais 14 ans. Les portugais canadiens se foutent de ta gueule à Paris sous 3 cm de neige cumulés, tu as cinquante ans et toute la France est paralysée, les routes sont noires, pas même un flocon sur les trottoirs, c’est le début de la sécheresse. Ils appellent ça une catastrophe. Les deux ! Il neige 3 cm c’est une catastrophe, il ne neige pas c’est une catastrophe. Ils disent que nous sommes trop nombreux, tu as cinquante ans . A 16 ans tu fleuretais dans les campings, finis les cailloux, le gazon était jaune et tes parents partaient en vacances, presque mille kilomètres en voiture essence, les bouchons à Lyon, au tunnel de Fourvière, juste pour avoir droit au soleil et aux jolies filles. Pas de climatisation, fenêtres ouvertes et papa qui fumait son troisième paquet de clopes, des gitanes filtre, un paquet rectangulaire bleu, comme le ciel que l’on allait chercher. Ton gps t’a perdu sur les quais de Lyon, direction Paris alors que tu descends vers le sud, la clim à fond, pas de bouchons tu as tout prévu sauf te faire niquer par ton gps, tu as cinquante ans. Maman regardait la carte, papa s’arrêtait pour regarder la carte, tout filait comme sur des roulettes et il fumait sa 59ème clope. Tu avais 20 ans et il pleuvait toujours en été, il y a même neigé en juillet en Lorraine. Les oiseaux ont tous le bec ouvert, ils crèvent de soif dans les jardins, les fleurs meurent, les arbres meurent, les gens meurent aussi, il fait quarante-cinq degrés en juin, tu as cinquante ans. Tu en avais trente et ton fils un an, tu ramassais des cailloux dans ton jardin pour faire place à une pelouse, il pleuvait encore cet été là, le soleil comme un reset sur la pluie, tu avais planté un bananier qui s’était fait hacher par un orage de grêle. Tu as cinquante ans et tu n’as plus de pelouse cet été, tout juste un ou deux pissenlits survivants d’une espèce d’apocalypse solaire. Tu avais acheté un pull polaire pour ses huit ans, tu n’avais pas prévu ce froid dans l’été, il avait chaud avec et c’était bien. Il a 21 ans et tu pleures car il va crever de chaud, ou de faim. 17 septembre 1986 tu ne savais pas ce que c’était. Tu avais 17 ans et les gens mutilés ont envahi ton cerveau, à jamais. Grand-père était mutilé, à la guerre en tuant des nazis. Tu avais 17 ans et papa t’a empêché de regarder la télé. Des photos, des vidéos, des reportages, des explications, tu as cinquante ans et tu prends tout dans la gueule, tous les jours, le Bataclan, les images en boucle sur les réseaux, pas de limite à l’information, il faut du sang, des barbus et des attentats, ça nourrit tes cauchemars, ta peur, ta haine. Tu avais 20 ans, tu tapais à la machine à écrire les lettres du capitaine, tard le soir, des ordres de combat, de stratégie de guerre, tempête du désert, tu étais aviateur de première classe, l’école des officiers de réserve t’avais recraché comme une vieille salade moisie, aspirant un jour seulement. Tua s cinquante ans, se promener à Nancy est un combat, tu revois tes stratégies, tu sais tuer, tu as été décoré par l’armée. Tu as cinquante ans et tu ne bouges plus de ton 7ème sous-sol, la guerre commence seulement en fait, tu n‘as encore rien vu.
Madloonflayed©-2019-j’en ai cinquante bordel et je ne suis pas prêt ... pas encore adapté à votre monde.

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