J’étais dans un rêve, à 15 ans, devenir vieux, qu’elle gueule j’aurai, combien de rides, combien d’enfants, marié ou pas, maison chien ou pas….jusque quel âge je vivrai, dans quel état, c’était excitant, énervant, insupportable, tant de questions sans réponses….j’ai les réponses car je suis plus vieux et j’aimerai me poser encore ces questions. Je suis dans un vieux monde et je tremble. J’ai regardé les Hommes grandir en même temps que moi, j’ai cherché quelques idéaux, j’ai surtout fait ce que personne ne ferait, je suis devenu ce que personne ne serait devenu, un putain d’homme contemporain. Il faut que tu m’expliques et que je te dise. J’ai pris le virage trop large tu sais. Celui qui chie dans de l’eau potable tout en dérapage, celui qui prend des douches avec de l’eau potable, celui qui arrose trois pieds de tomates mildiousés avec de l’eau potable, celui qui lave sa bagnole avec de l’eau potable, celui qui lave le sol avec de l’eau potable…. Une espèce de gros con en fait. Ivre. Tu es un gros con au fait ???? Hier tu manifestais pour avoir plus de tunes, hier tu manifestais à côté de Miss couettes pour ne pas crever la gueule ouverte en pleine canicule, aujourd’hui tu chies sur les bagnoles thermiques, demain tu crèveras sur ton vélo électrique en plein mois de juillet grisé par la vitesse…mais finalement tu fais quoi de mieux que moi ? Tous plus ou moins non ? Je ne comprends plus le monde pour lequel mes parents m’ont poussé dehors, dehors de cette maison à la campagne, au chaud en hiver, au froid en été, de bonnes godasses pour l’hiver, de bons shorts pour l’été, des bisous avant de dormir, des câlins, la douceur des mots de ma maman tous les jours, de bons repas, de l’eau chaude potable pour les bains, au moins cent litres….Je suis perdu, je ne comprends plus. Que faut-il faire aujourd’hui ? Faudra s’y faire et s’y perdre ? Pleurer pour qu’il pleuve sur les sols trop secs pour se nourrir, pleurer pour qu’il ne gèle pas sur les pieds de vignes en février pour pouvoir picoler, pleurer pour avoir le dernier Iphone, pleurer pour que les vieux ne soient plus traités comme des cadavres chez Orpea, je ne sais pas où il faut pleurer. Il faut trop pleurer. Les yeux bleus de juillet ou les yeux ….ohhhhhhh ! Alors la solution est de voter il parait, voter pour arrêter de pleurer, voter pour se faire vacciner, voter pour pouvoir repleurer. Ouai je suis perdu. J’essaie de me rappeler pourquoi je tapais contre les murs poings nus jusqu’à ce que ma peau éclate dans une douleur atroce, ce n’était pas si loin finalement et puis je continue, sauf que maintenant ce sont les os qui cassent. Je peux te montrer les cicatrices si tu y tiens, elles sont encore visibles. Plus visibles que ma vie. Maintenant je sais pourquoi. Mais je ne sais pas pourquoi moi, pourquoi faut-il que ce soit moi qui y pense, qui souffre, qui saigne. J’ai fleureté avec les extrêmes, marcher dans le vide, prendre de la cocaïne dans la salle d’eau du lycée, rouler comme un dingue sans phares sur une île la nuit, écrire en haut d’un pont sur 4 cm² au-dessus du vide, couper des barres de shit dans un appart à Talange, insulter des flics à Hagondange en sortant du train complétement déchiré, pisser dans ma cellule de dégrisement et montrer ma bite à la fliquette et me prendre une énorme gifle dans la gueule par la même fliquette, monter dans une bagnole d’un taré qui prenait des virages au frein à main juste à côté de la Meurthe, dealer des moules de Bouchot à la sortie d’un Cora à des clodos en décembre…je ne sais plus, je ne sais plus pourquoi, je ne sais plus pourquoi je voulais absolument mourir, mais comment fait-on putain, je ne voulais plus être vieux, je ne voulais plus me poser trop de questions….Combien de temps encore avant de dormir enfin ? Et je me pose encore des questions qui celles-ci resteront sans réponses, ou je n’aurai jamais le temps de les écrire, ou j’aurai les réponses mais je serai végétatif tranquille dans un HP, ce qui reste le meilleur scénario pour moi, comme mon grand-père, mort de folie, mort dans une cellule à l’abri des regards de ses fils et filles, mort sous mes yeux, coincé au fond de ma tête, l’éternel grand-père, le seul qui a su lire dans mes yeux, le seul qui a su que je serai cinglé, le seul qui m’a guidé vers la folie, le seul qui savait pourquoi je pleurai avec un lapin dans les bras. Il est encore là, ce soir, avec moi, avec mon vin, ma folie, mon envie de fuir, il sait où je veux aller et m’enfermer, c’était le seul qui a su ! Mais c’est encore lui qui me dit d’attendre, de regarder plus loin, c’est lui et je l’entends, tous les jours. Tu entends qui toi ? Qui te guide ? Quel est le fils de pute qui te dit que tu es meilleur en méprisant l’autre ? Parce que c’est toi ça, le méprisant, c’est ça ton héritage à toi ? Mon grand-père était largement au-dessus, enfoncé dans son atelier avec cette odeur de bois, de colle, de moisi, il volait vachement plus haut que ce que je vois de toi. N’oublie pas, j’ai les mêmes ailes que lui et je vois aussi bien que lui. Pépère aide-moi ! Tu étais un artiste, un écrivain, un poète… sans œuvres, sans livres, sans rimes. Si tu savais maintenant que les noirs veulent être noirs, que les blancs ne veulent plus y être, que les pédés veulent être encore plus pédés que pédés, que les femmes ne veulent plus y être mais se baladent les seins nus dans les rues pour dire qu’elles y sont, que les enfants n’ont plus le droit de jouer dans la terre mais juste dans des espaces clos, je ne sais même plus si ce sont des enfants en fait, que ta maladie se soigne dans des mouroirs, que je suis malheureux et suicidaire et que je suis toujours celui que j’étais, que les voitures à pédales reviennent en force mais sans pédaler…. Tu sais je suis en colère et je viens de me flinguer avec mon pistolet à eau. Explique leur toi, que le temps est stupide.
J’étais dans un rêve, à 15 ans, je suis devenu vieux, je lis beaucoup mais je n’ai pas de bibliothèque, je bois beaucoup mais je n’ai pas de cave, je pollue juste parce que je suis vivant, je suis celui qui fait mourir l’humanité, je suis toi…et tu ne dis rien ????
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