samedi 7 septembre 2013

LA FRACTURE


Je n’aurai jamais imaginé vivre cette fracture, décisive et brutale. Je n’avais rien décidé, rien voulu, mais ça a cassé net. Aujourd’hui, quelques mois après, je remercie Dieu (je ne crois pas mais je prie) de m’avoir offert ce cadeau. D’un coup de sabre précis, cinglant dans un été violent et brûlant, la fracture s’opéra dans un bruit de verre cassé. Mais bizarrement, rien à ramasser, pas un bout de verre, rien. Du coup le passé est effacé à tout jamais et ça, c’est le cadeau. Une éclaircie dans le ciel, un miracle finalement. Repartir pour devenir. Et ma fée et moi, nous avons fait du propre, un bon nettoyage et à travers les vitres nous avons vu, enfin nous avons vu clair : « ce que tu vois là ma fée, c’est juste pour nous ». Bon une fracture il faut la bander, la soigner, mais jamais elle ne t’empêche d’avancer. Alors du coup, tout est allé très vite. « C’est quoi ton rêve ?» m’a demandé ma fée. « Je ne sais pas moi, j’en ai plein, le premier qui me vient comme ça, je dirai faire ce que je veux et ne plus voir les autres, je veux une greffe d’oeuillières. ». « D’accord je te les achète ». « Pas besoin, je les ai déjà, mais j’osais pas les mettre. ». « Vas-y mets les et on verra bien ». Quel jeu de mots ma fée… Et là, rencontre insensée, des gens, des humains nous parlent, échangent, on fume, on parle, on danse, on boit… Cette rencontre fût le départ de tout ce qui nous arrive maintenant. « Tu m’avais dit de vivre ma fée, ben là je vis ». Et avec ces gens, c’est plus facile, pas de jalousie compulsive, pas d’envieux agressifs, pas d’hypocrisie maladive, pas de mots par derrière, bref genre comme dans un rêve. Et puis ces gens parlent aux autres, puis voilà un groupe, un groupe de gens comme nous. Des idées communes : la vie, les envies motrices, les joies, les enfants, les espoirs constructifs mais pas d’aprioris. T’es humain, moi aussi. Ça tombe bien. Au fil des discussions nocturnes autour de quelques verres, de grandes soirées à vivre des moments clairs, adolescents. Mais que nous arrive-t-il ? Sommes-nous dans un de mes fameux rêves ? Non. A demain alors. Demain c’est aujourd’hui, je débéquille et on roule, vers où ? Pas de lois, pas de chemins définis à l’avance. C’est la vie qui décide. Ben roule alors. Un V-twin en bruit de fond, c’est le mien, aussi bruyant que mon cœur quand je caresse le genou de ma fée dans ces moments de complicité filant à toute allure. « Roule !!!! » hurle-t-elle derrière. Oui je roule. Puis ces gens nous offrent une part d’eux. « Non c’est trop, je ne veux rien pour ne pas redonner ». « Mais Manu, je ne veux rien, je te donne, tu prends, tu t’éclates, tu vis enfin, c’est bien non ? «. «  Absolument ». Pas plus tard qu’hier, une fête simple, entre amis. Les ¾ artistes, des chanteurs, des guitaristes, tous des musiciens dans l’âme mais pas que. Ils vivent sur terre eux, un concert improvisé. Celui-là crie : » pour toi mon pote, Manu, ce morceau c’est toi qui l’a écrit, rappelles toi, ce soir je l’ai reprise pour toi avec ma gratte, rien que pour toi, écoute. Ecoute mon pote. » Des larmes coulent, ce type, il a tout compris de ma vie. Puis aujourd’hui le festival, le cadeau et un de plus. Je l’ai rêvé, et maintenant elle est là, à tout jamais, une fête, une moto. Une virée incroyable, le cap ’tain file le train, je débéquille et avec ma belle je suis, je les suis. Indescriptible sensation, des frissons, des larmes de joie au passage de la 4ème. Le reste, seuls ceux qui roulent en Harley peuvent comprendre. Une virée de folie. Au retour, ce type sans âge m’enrôle dans une conversation improbable sur la mécanique. « Je t’ai vu Manu, c’est quoi ton délire, t’es à fond comme ça tout le temps ? Tu aimes les gens sans retenue, t’es un mec pur toi. » Ma vie, c’est elle, ma fée, c’est lui, mon fils. Sans retenue. Et les heures passent avec ce type, ce type est un grand PDG international, une boite de folie avec des milliers d’employés, un type génial, c’est le grand patron m’a-t-on dit après. « Ben je ne savais pas moi, moi je ne suis que de la merde vous savez, je ne suis rien qu’un petit employé de daube. ». « On s’en branle mon pote, t’es comme nous. ». L’autre qui a écrit la Song for me est déjà à son troisième album, tu le connais, on le connaît tous. Et moi là-dedans, qu’est-ce que je fous là ? Ils s’en branlent, ils m’aiment pour mes textes, ils adorent mon pseudo bouquin, rien de plus, rien de mieux. D’accord. Cela fait presque une année que cela dure, le chemin vers la fin est long, cette fois-ci, tiens-toi bien mon pote, ça roule. Bref depuis tous ces mois, des rencontres insensées, des bikers hors du commun, des artistes musiciens hallucinants, des artistes peintres incompréhensibles, des écrivains connus sans réserves, des patrons internationaux, et moi, moi qui sort doucement de ma coquille et qui explore ce monde nouveau, ce monde où les gens vivent, ne nous prennent pas pour de la merde, je me sens humain, enfin heureux de l’être. Mais c'est quoi ce joyeux bordel ? Ah putain, j'avais oublié que j'arrive à rêver éveillé, je suis un mythomane du bonheur, tous ces mots, tous ces mots, tous ces mots, mais quand cela finira-t-il ? Laisse moi, laisse moi m'en aller.....

 

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